Ma chambre froide
texte & mise en scène Joël Pommerat
du 02 mars 2011 au 27 mars 2011
Ateliers Berthier
avec Jacob Ahrend, Saadia Bentaïeb, Lionel Codino, Ruth Olaizola, Frédéric Laurent, Serge Larivière, Marie Piemontese, Nathalie Rjewsky, Dominique Tack
Je cherche simplement à donner à voir.
Joël Pommerat
Présumer de ce que sera la prochaine pièce de Pommerat n’a aucun sens. Tout véritable projet artistique procède d’une rencontre secrète entre les visées informulées d’un artiste et la réplique que le monde va leur donner. Laissons donc Pommerat mûrir son travail en silence, à son rythme. Et en attendant, empruntons-lui ces quelques mots : «Lorsque je vois les spectateurs qui patientent pour entrer dans une salle où se joue un de mes spectacles, je sens en moi une grande responsabilité. Ces gens sont là parce qu’ils en ont envie. Ils sont curieux et je ne peux et ne veux pas décevoir cette curiosité. […] / Le spectateur n’est pas un intrus. Il est essentiel s’il arrive au bon moment. Il est celui qui rend le geste et la parole. Celui qui les fait exister. Celui qui finit le processus de création de la réalité. Il achève le processus de révélation de l’instant. / Nous sommes au théâtre. Nous ne devons jamais l’oublier. Nous sommes dans un espace et dans un lieu. Nous répétons souvent dans des théâtres. Nous répétons donc dans des espaces vides. Dans une architecture conçue pour abriter des regards, des corps, des impatiences, des désirs, des sensations, des sensibilités. Et c’est toute cette matière humaine vivante qui va finir de créer cette réalité dont je parle. Le spectateur est un élément indispensable du processus de recherche. / Ce qui est certain, c’est que le jour où je regarderai un spectacle que j’ai fabriqué sans les spectateurs, le jour, donc, où je le regarderai, au milieu d’eux, je verrai des choses pour la première fois. À ce moment-là, une autre étape de l’écriture commencera parce que, réellement, des choses vont me parvenir que je n’avais pas pu déceler auparavant. Un spectacle finit de s’écrire dans les deux ou trois premières semaines de confrontation au public. La représentation est modifiée suivant la disponibilité ou non du spectateur, la curiosité de son regard. Il y a évidemment interaction. Le spectacle est altéré par le regard, non seulement altéré mais il peut être détruit par le regard, l’absence de regard ou l’absence de désir. / On ne peut pas faire du théâtre, on ne peut pas mener l’expérience de cette recherche d’être, sans le regard de l’autre. C’est ce qui est à la fois très beau et impur».
à lire Joël Pommerat, troubles de Joëlle Gayot & Joël Pommerat, Actes Sud, 2009