Loué soit le progrès

de GREGORY MOTTON
mise en scène LUKAS HEMLEB
du 06 avril 1999 au 18 mai 1999
La Cabane



Lukas Hemleb (qui fut l'assistant de Grüber, de Stein, de Bondy et de Ronconi) est de ces metteurs en scène qui aiment faire partager leurs découvertes. Après nous avoir révélé au Petit Odéon les poètes de l'Obériou avec Voyages dans le chaos, il nous propose en création mondiale, en compagnie des comédiens de la troupe de l'Odéon, la dernière pièce de Gregory Motton, le jeune dramaturge britannique que Claude Régy a fait connaëtre au public français. Selon Hemleb, elle marque " un sommet dans son écriture. Et son humour dévastateur trahit une rare inquiétude. L'enfer et l'hilarité. Personnages, lieux, éléments et situations, tout est ici emporté dans un incroyable courant de métamorphose. Comme si tout le réel était à double fond, inextricablement banal et métaphysique à la fois, ou comme si le temps propre de ce théâtre était celui d'un souvenir du présent : pareil à l'origine des temps, il tient moins de l'anecdote que du rêve et du mythe - ou de la caricature sauvage et désarticulée d'un conte philosophique.

Tout commence par un interrogatoire anodin au cours de ce qui semble n'être qu'une scène de pêche paisible, bien qu'un peu étrange, décalée, "déglinguée". Très vite, nous apprendrons qu'il s'agissait en fait du lynchage d'un inconnu. Le "poisson ordinaire, d'os et de chair" était un homme battu à mort, puis pendu avant d'être jeté à l'eau. Ratonnade à mettre au compte d'une bande de jeunes ? Crime collectif d'une foule hystérique ? Simulacre d'exécution ? Nul n'en sait rien. La pièce est lancée, et son moteur est le désarroi.

 

Gregory Motton est un dramaturge radicalement moderne. Son théâtre est comme une membrane qui vibre sous tous les coups de l'ignominie du monde, à toutes les échelles, depuis la violence des guerres civiles jusqu'aux fêlures intimes des couples. Et dans ces décombres, son humour surgit quand on s'y attend le moins. Réalisme et fantastique, matérialisme et féerie travaillent ensemble à former un poème furieux d'une étrange beauté ".