(1815 - 1888)
Issu d'une famille appartenant à la bourgeoisie parisienne, Eugène Labiche en fut un observateur attentif, exposant avec justesse des types psychologiques de ce milieu ainsi que le rôle de l'argent dans la société française sous le Second Empire et les débuts de la Troisième République.
En 1839 paraît son unique roman, La Clef des champs. Il s'essaie également à la critique dramatique, livrant ses articles à la Revue du Théâtre, avant de se consacrer à l'écriture pour le théâtre.
Cet auteur dramatique et comique s'illustra surtout dans le genre du vaudeville, qu'il décrit lui-même comme « l'art d'être bête avec des couplets ». Ses premières œuvres constituent des variations sur des scènes de la vie conjugale et de ses affres.
Ses personnages sont en majorité des figures archétypales du monde bourgeois. Il passe ainsi pour l'inventeur d'une figure emblématique de la société du XIXe siècle : le bourgeois crédule et philistin. Nombreuses sont les figures de beaux-pères irascibles, dans cette production gaie-satirique.
Ses productions théâtrales évolueront des vaudevilles en un acte aux grandes comédies de mœurs et de caractères : il laissera finalement plus de 173 pièces.
Parmi celles-ci, on représente souvent Un Chapeau de paille d'Italie (créée en 1852), considérée comme la plus réussie. Cette pièce, composée après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte et le rétablissement de l'Empire, renouvelle le genre du vaudeville, dont la tradition est marquée par l'œuvre de Scribe, grâce à l'apport d'un thème nouveau : la recherche d'un objet égaré, sous la forme d'une course-poursuite qui engendre nombre d'événements imprévus.
Si ses comédies sont le plus souvent fondées sur des rebondissements successifs et des situations cocasses, l'humour léger vire parfois au cauchemar, en témoigne L'Affaire de la rue de Lourcine (1857). Parmi les mises en scène remarquables de cette pièce, on relève celle de Patrice Chéreau, en 1966, etcelle de Klaus Michael Grüber, en 1989. Avec Le Voyage de Monsieur Perrichon (1860), Labiche propose une satire de la bourgeoisie du second Empire, nouvellement enrichie et ambitieuse.
Autre apport important, dans le champ de l'écriture pour la scène : le comique fondé sur l'absurde. Certes, Eugène Labiche n'est pas l'inventeur du théâtre de l'absurde, l'expression désignant surtout, dans la période de l'après seconde Guerre mondiale, les productions de Ionesco, d'Adamov, etc. Il a néanmoins initié une situation comique dépassant le « simple » quiproquo et sa propre tradition comique fondée sur une succession rythmée d'événements produisant les situations les plus extravagantes. Le critique Philippe Soupault [cf. Eugène Labiche, sa vie, son œuvre, Mercure de France, 1964] note que le théâtre d'Eugène Labiche comprend alors une certaine part de « cruauté », soit une manière plus grinçante de rire.
Labiche à l'Odéon :
- Doit-on le dire ?, ms Jean-Laurent Cochet (1977)
- L'Affaire de la rue de Lourcine, ms Jérome Deschamps et Macha Makeïeff (2007)