Joseph Kessel
Ce fut ainsi que le premier Russe vint habiter dans la pension de famille. Bientôt, par une multiplication, une prolifération mystérieuse qui laissaient Mlle Mesureux effarée et stupide, ils furent trois, puis cinq, puis dix et enfin tout ce qui restait de vacant dans sa maison fut occupé par des gens qui, tous, inscrivaient sur les feuilles de police : Passeport de la Société des Nations.
Joseph Kessel. Nuits de princes, 1927.
Animé par Paula Jacques
Joseph Kessel naît par hasard en Argentine en 1895, son père, un médecin russe, ayant obtenu un poste pour trois ans dans la Pampa. En 1908, après une dizaine d'années passées à Orenburg, une ville russe proche du Kazakhstan, la famille s'installe à Nice. Adolescent, il part pour Paris où il pense devenir comédien. Bien qu'il fasse ses débuts au théâtre de l'Odéon et qu'il s'essaie à écrire une pièce, il entre, à dix-sept ans et demi, au Journal des débats, et c'est là que commence sa véritable vocation. Engagé volontaire pendant la Première Guerre Mondiale, une mission le conduit à Vladivostok, d'où il ne regagne la France que par un long périple. Dès son retour, il revient au journalisme en qualité de grand reporter. Il ne cessera plus de courir le monde. Son premier roman, La Steppe rouge, publié par Gaston Gallimard en 1922, est un succès immédiat. En 1930 Gallimard lui confie la direction de Détective, où il publiera des histoires de mauvais garçons signées Francis Carco, Pierre Mac Orlan, Albert Londres, et, bien sûr, Joseph Kessel. La Seconde Guerre Mondiale entraîne son départ pour Londres et son entrée en Résistance. Il écrit avec son neveu Maurice Druon Le Chant des partisans, et compose L'Armée des ombres qui paraît à Alger en 1943. Après la guerre il repart pour l'Afrique des Grands Lacs et pour l'Extrême-Orient. L’Afghanistan, avec ses steppes arides, ses cavaliers intrépides lui fait forte impression. De ses souvenirs du Kenya, il tire Le Lion (1958), qui lui vaudra son plus grand succès. En 1963 il fait son entrée à l'Académie française. Il entreprend d'écrire, au prix de cinq ans d'efforts, ce qu'il appelle son « testament », Les Cavaliers (1967). Il meurt d'une crise cardiaque en 1979 à Avernes (Val-d'Oise).
Olivier Weber est écrivain et journaliste, ancien reporter de guerre. Il est lauréat du Prix Joseph Kessel, qu'il préside désormais, du Prix Albert Londres et du Prix Amerigo Vespucci pour ses romans et livres de reportages. Il est auteur de la biographie Kessel, le nomade éternel (Arthaud, 2006).